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TF1003542
MINISTÈRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES Conseil de l'Europe
PERSPECTIVES 2020
Allocution de M. Zoran PETROV, vice-ministre des Affaires étrangères, représentant le Président du Comité des Ministres Erevan, 19-21 octobre 2010 Mesdames et Messieurs, Je suis très heureux de me trouver aujourd'hui parmi vous pour vous présenter quelques remarques en guise d'ouverture du Forum, au nom de la présidence macédonienne du Comité des Ministres. Notre conférence a un programme ambitieux – examiner les principes qui gouvernent et les enjeux qui concernent la démocratie aujourd'hui en Europe. Avec un calendrier aussi vaste, il est peu probable que nous quitterons cette belle ville d'Erevan avec une série complète de réponses à toutes nos questions. Pourtant ces discussions sont cruciales. Le visage de la démocratie est en train de changer et le Conseil de l'Europe, dont l’objectif essentiel est la promotion et le renforcement de la démocratie, doit rester vigilant et conserver une attitude ouverte à cet égard. Il doit reconnaître et relever les nouveaux défis s'il veut demeurer le garant de la démocratie européenne. Les défenseurs de la démocratie la définissent comme un mécanisme qui légitime les décisions politiques respectant certains principes, règles et mécanismes de participation, de représentation et de responsabilité. La démocratie n’est donc pas seulement une forme de gouvernement, c’est aussi un ensemble de valeurs qui sont au cœur de la mission de notre organisation. Cependant, si la théorie est simple, la construction, la consolidation et la conservation d'un véritable Etat démocratique constituent un processus complexe. Il est complexe parce que les développements sociétaux, politiques et technologiques ne cessent de modifier le contexte dans
Les défis et les facteurs qui influent sur la qualité de la démocratie ont donc de multiples aspects. Et ce sont ces facteurs qui sont au centre de nos débats cette semaine. A ce sujet, j'aimerais profiter de cette occasion pour dire combien nous apprécions la très grande qualité des documents thématiques qui ont été préparés. C'est une initiative très utile de nos hôtes arméniens. Ces documents abordent certains problèmes cruciaux et je suis persuadé qu’ils offriront un bon point de départ à nos discussions. Je tiens aussi à souligner l'acquis important du Conseil de l'Europe en ce qui concerne les principes démocratiques, qui illustre la vaste expérience de l'Organisation et fournit des bases solides pour nos futurs travaux. A cet égard, je salue particulièrement le travail de la Commission de Venise qui a magnifiquement contribué au cours des 20 dernières années à façonner et soutenir les transitions démocratiques sur notre continent. Nous sommes persuadés qu'elle continuera à nous guider et à nous aider à relever les défis qui nous attendent. Mesdames et Messieurs, J'ai déjà mentionné les mots clés que nous associons à la notion de démocratie : légitimité, principes, règles, participation, représentation et responsabilité. Toutes ces notions sont évidemment interdépendantes. Mais leur réussite ou leur échec sont étroitement liés à la culture politique de nos sociétés, ou, plus simplement, à la manière dont les citoyens appréhendent la politique. Par conséquent, pour conduire efficacemment nos processus démocratiques à l’avenir, nous devons dialoguer pleinement avec nos électeurs. Ce n'est qu'en écoutant et plus encore en entendant nos électeurs que nous pourrons identifier les faiblesses de nos mécanismes et trouver les solutions éventuelles permettant de les corriger. L'instauration d'un dialogue véritable et approfondi avec les électeurs a toujours permis d'élaborer des politiques réalistes dans tous les domaines. Les médias jouent à cet égard un rôle essentiel. Aucun de nos Etats membres ne jouit d'une société parfaite et d'un régime politique parfait. Tous nos processus démocratiques connaissent des difficultés ou des lacunes. Dans de nombreux Etats, les électeurs ont perdu non seulement tout intérêt, mais aussi toute confiance dans la politique, les responsables, les partis et les affaires politiques. Il nous faut attaquer ce problème à la racine, en œuvrant constamment pour un gouvernement transparent et une bonne gouvernance et en persuadant chaque citoyen que sa voix compte. Pour cela, nous devons continuer à poser des questions. J'en évoquerai deux aujourd’hui. La première concerne le principe d'égalité. Nous supposons que l'égalité politique est un acquis. Tous les citoyens ont le droit de voter et de se présenter aux élections. Mais on peut se demander si dans la pratique l'égalité politique peut vraiment coexister avec l'inégalité économique ? La participation à la vie politique dans les Etats membres est-elle de plus en plus liée à des facteurs économiques et sociaux ? Peut-on s'étonner que les personnes qui vivent près ou en-dessous du seuil de pauvreté ne s'intéressent pas à la politique ou soient plus facilement manipulées par les responsables politiques ? Est-ce une coïncidence si les catégories traditionnellement écartées des processus politiques sont souvent les plus vulnérables de notre société ? Nous devons nous occuper davantage de ces personnes et faire en sorte que nos sociétés soient plus cohésives et démocratiquement inclusives. Cet objectif ne sera pas facile à atteindre et appelle à une plus grande solidarité au sein de la société. La seconde question concerne la représentation. Les formes traditionnelles de représentation politique ne sont plus aussi simples qu'autrefois. Les électeurs ne se contentent plus de désigner de temps en temps des responsables politiques pour prendre des décisions à leur place. La démocratie participative complète, qui a ses partisans et ses opposants, représente une solution de remplacement. Ses partisans la considèrent comme le régime qui garantit l'implication et l'accord de la population, qui lui donnent donc sa légitimité. Ses opposants soulignent les risques que représenterait une opinion majoritaire qui ne serait pas nécessairement favorable au respect des libertés et des droits individuels. Y-a-t-il donc d'autres solutions envisageables ? Existe-t-il une voie médiane entre la politique représentative et la démocratie directe, qui permette cette « culture civique » conciliant la participation des citoyens au processus politique et le besoin vital qu'a le gouvernement de gouverner ? Quand nous examinons la situation des différents Etats membres du Conseil de l'Europe, les formes concrètes de la démocratie varient, ainsi que le fonctionnement des institutions démocratiques. La diversité des problèmes rencontrés appelle des réponses différentes. Ce ne sont que deux parmi les nombreuses questions que nous devons nous poser. Mais il est clair qu'une culture politique dynamique caractérisée par des processus démocratiques mis en œuvre en pleine transparence et avec des règles bien précises a de grandes chances d’assurer la légitimité d'un gouvernement. Et la légitimité, qui donne au pouvoir son autorité, est évidemment la marque d'une démocratie en bonne santé et une garantie de stabilité politique. Nos principaux objectifs pour le progrès de la démocratie jusqu'en 2020 doivent être le renforcement de la cohésion sociale et de la participation démocratique par une plus grande implication de la société civile, consolidant ainsi l'unité européenne. Mesdames et Messieurs, La notion de démocratie existe depuis très longtemps et continuera d'exister encore longtemps. Elle s'est adaptée au fil du temps et continuera de le faire à l'avenir. Sa longévité tient au fait qu'elle reconnaît la valeur et l'égalité de tous les êtres humains afin qu'ils puissent participer aux décisions qui les concernent et déterminent l’avenir de leur société. Les valeurs qui sous-tendent la démocratie depuis si longtemps doivent continuer à façonner nos mécanismes démocratiques à l'avenir. Cette tâche n'a pas de fin. Mais en faisant preuve de diligence et d'imagination politique, nous pouvons réagir face aux tendances qui menacent d'affaiblir nos processus démocratiques et trouver des méthodes et des moyens novateurs pour permettre à nos Etats membres de poursuivre leurs efforts vers une démocratie véritable en Europe. Je vous remercie de votre attention. |